J’étais très impatient de découvrir « COWBOY », car non seulement, Ben POELVOORDE et Gilbert MELKI font partie de mes chouchous ; mais surtout « LES CONVOYEURS ATTENDENT » (1999) du même Benoît MARIAGE, est à mes yeux probablement l’un des films les plus intéressant de la décennie ! Oui, Monsieur ! Et bien mes fortes attentes n’ont pas été déçues… Non, la seule chose un peu négative que je pourrais évoquer à propos de ce film est son titre, qui me plonge dans un abîme de perplexité, jusqu’à ce que je réalise que le titre, on s’en fout un peu, en fait !
La quarantaine dépressive, Benoît PIRON, journaliste et présentateur « vedette » d’une lamentable émission sur la prévention routière, se penche sur ses illusions perdues en décidant de tourner un film, 25 ans après les faits, sur les héros d’une spectaculaire prise d’otage à caractère anarchiste…
A l’opposé de l’incroyable ratage de « QUAND J’ETAIS CHANTEUR » sur un thème assez similaire, B. MARIAGE, fait lui au contraire face à son sujet avec une réjouissante acuité en nous proposant ce bouleversant portrait de journaliste plus ou moins « ringard ». « COWBOY » nous touche, car à partir d’un point de départ qui semble un peu obscur, il aborde des thèmes universels et terriblement humains : qu’a-t-on fait de notre vie ? Est-ce que celle-ci correspond à ce que nous voulions qu’elle soit ? Que sont devenus les aspirations, les illusions de nos 20 ans ?!
Ce qui est très intéressant dans ce scénario, c’est le mélange subtil de réalisme, de burlesque et d’absurde. Un équilibre extrêmement subtil alors que le moindre faux pas se paierait cash : trop de réalisme, et la comédie disparaît pour basculer dans un film sinistre et ennuyeux. Trop d’absurde ou de burlesque : on ne croit plus à l’histoire, l’émotion s’évapore et laisse le spectateur orphelin. Mais ici, la mayonnaise prend et on s’en lèche les doigts…
Dès la première séquence, ce personnage de looser torturé nous touche. Déjà parce que POELVOORDE avec son visage improbable est méconnaissable derrière ses lunettes et sa barbe et que B. MARIAGE a la bonne idée de le filmer au plus près. On sent si bien sa détresse intérieure qu’on aurait envie de le prendre dans nos bras et de lui dire qu’il est merveilleux, car il a déjà le mérite de douter et de se poser mille questions au lieu de surveiller les dividendes son P.E.L. : A défaut, on sera au moins prêt à le suivre jusqu'au bout de son incroyable et pathétique projet de film !
Car derrière cette farce, nous assistons en réalité bel et bien à un drame en direct, celui d’un homme qui ne sachant plus qui il est, s’engage à fond mais dans la mauvaise direction. Cette comédie belge a donc franchement un parfum de comédie italienne mais dans ce qu’elle a de plus cruelle, de plus noire. Cette tragi-comédie nous réserve aussi une ribambelle (j’adore ce mot « ribambelle », pas vous ?!) de réjouissantes séquences, telles les tournages de l’émission sur la prévention routière, la scène du pommeau de douche, la « démonstration de la salive », la séquence d’apprentissage chez la puéricultrice ou encore l’étourdissante visite du couple en crise chez le morpho-psychologue…
Autour de POELVOORDE, encore une fois magistral, saluons un casting étourdissant avec en tête l’improbable duo de techniciens qui accompagne notre héros (François DAMIENS et Jean-Marie BARBIER) ainsi que Gilbert MELKI, stupéfiant dans son personnage d’opportuniste vulgaire et désabusé.
Reste la fin, certes efficace, mais qui, au regard de la qualité et de l’ambition du film, semble un peu en dessous : la chanson est un moyen toujours imparable de toucher le spectateur mais c’est souvent l’apanage des réalisateurs les moins sûrs de leur talent, ce dont ne manque Ben MARIAGE !
Plus inquiétant, certains avis négatifs que j’ai pu lire ça et là sur ce film, par exemple sur le site Allociné. Bien sûr, personne n’est obligé d’aimer un film mais il me paraît important que chacun puisse prendre au moins conscience du courage et du talent de ceux qui innovent. Et en matière d’humour, ce n’est pas si fréquent…
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