Oh my God, quel calvaire ! On ne sort pas indemne d’une telle projection et il est clair que nous sommes nombreux désormais à détester et pour longtemps tout ce qui est ciels, nuages, planètes, volcans, gouttes d’eau, fonds sous-marins, reflets du soleil, herbes folles soulevées par le vent, etc. Sans parler de la musique classique, et bien sûr de Dieu. Car c’est la première fois que je sors d’une projection en ayant l’impression d’avoir été à la messe : ça m’apprendra à aller au ciné un dimanche.
J’étais pourtant prévenu puisque deux amis* très chers avaient dans leur commentaire du film étrangement utilisé le même adjectif peu flatteur : « boursouflé ». De même les critiques du Masque et la Plume (France Inter) n’avaient-ils pas été dithyrambiques ?! De quoi là aussi s’inquiéter quand on connaît leur propension à souvent (mais pas toujours, ce serait trop simple !) défendre les faux artistes et les pâles copies…
Oui mais j’avais fait fi de tout ça. Parce que zut de zut, c’est quand même Terrence M. ! Et Terrence est, enfin était (!), dans mon top 5 des cinéastes. Parce que La Ballade Sauvage, parce que Les Moissons du Ciel, deux splendeurs envoûtantes et puis, et puis surtout… La Ligne Rouge, probablement la plus grande émotion cinématographique de ma pas courte vie. Mars 99, dans un cinéma de Versailles : la projection se termine et là, impossible de me lever, l’émotion est trop intense, je me sens bouleversé et euphorique en même temps. Ce film m’a touché comme jamais, j’ai l’impression d’avoir saisi quelque chose, de me sentir presque intelligent, sensation nouvelle pour moi ! J’appelle les amis que je devais voir après pour me décommander et j’enquille une deuxième séance dernière dans le même état d'extase. J’ai couru ensuite acheté le CD et le film m’a porté pendant une semaine entière : Incroyable, merveilleux ! Je m’arrête là car tout a été écrit sur ce film inouï, sorte de conte sensitif et métaphysique sur le sens de la vie sur fond de guerre.
Inquiet des rumeurs négatives sur son film suivant, Le Nouveau Monde, je l’avais bêtement zappé pour mieux attendre le prochain, présenté à Cannes qui plus est : vous comprendrez aisément que le choc n’en a été que plus rude et que je n’ai aucune envie de m’acharner. Sinon dire qu’une fois de plus, Cannes a couronné le moins bon film d’un cinéaste, qu’à force d’enchaîner des symboles comme des perles, le spectateur dit stop, que le final avec tous les personnages rassemblés sur la plage a déjà été fait 1000 fois et beaucoup mieux (Big Fish), que l’équation qui semble nous être proposée : « Dieu a créé la nature / La nature est magnifique / Dieu est donc magnifique / Mais Dieu nous a aussi créé donc nous aussi nous sommes vachement magnifiques malgré nos faiblesses et nos erreurs, gna gna gna… » est consternante et que oui, c’est vrai, les acteurs et notamment la sublime Jessica Chastain sont, eux, tout à fait convaincants, d’où sensation d’énorme gâchis…
So Terence, je te propose un deal : je repose ma tronçonneuse mais toi, STP, tu te prends un bon scénar (call me si besoin), des acteurs, tu mets un tout petit peu ton pote Dieu de côté et surtout, surtout, ne nous fais plus de bande démo pour le National Geographic… Thanks.
* Spécial dédicace Maud et Xavier.
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