Dans un numéro récent du journal « 20 minutes », le directeur éditorial de la chaîne COMÉDIE explique tranquillement :
« Nous recevons une trentaine de projets par semaine et nous en validons 4 à 5 par an. »
Ce qui fait moins d’un sur 300 !!!
Bref, être auteur et/ou créateur de concept, c’est à peu près comme de jouer à l’Euro Millions !
Attention, je n’ai rien contre ce monsieur qui a bien sûr un budget à tenir, et j’imagine bien que derrière chacun de ces 1500 projets reçus annuellement par la chaîne, il n’y a pas que d’authentiques chef-d’œuvres, mais il n’empêche, quelle douleur !
Je me demande souvent si les responsables de chaîne ou de fiction mesurent bien l’incroyable pouvoir qui est le leur ?! Savent-ils que derrière tous ces dossiers qui s’amoncèlent sur leur bureau puis dans leur poubelle immense container sur lesquels bien souvent, ils n’ont pas même jeté un regard, se cachent pourtant combien d’attentes, d’espoirs, d’ambitions, de revanches à prendre, de rêves merveilleux, de désirs fous ?! Combien de nuits beiges ou blanches, de clopes, de chichons, de caféine, de vodka ou de rien du tout ?! Combien d’heures d’angoisse face au néant, face au cerveau absolument vide avant l’orgasme, souvent tardif, de l’idée (géniale ou consternante) qui enfin jaillit, au moment où justement on ne l’attend plus, sous la douche ou en versant des coquillettes ?! Et aussi combien de photocopies réalisées fébrilement et en douce, pendant que le boss de la copine ou de la soeur est parti déjeuner ?! Combien de couvertures faites et refaites 1000 fois ?! Combien de «Cette fois, ça va le faire», «Je crois que je tiens un bon truc», «L’important c’est d’y croire», «C’est pile poil ce qu’il leur faut», «On va faire un carton», «Le meilleur concept que j’ai jamais pondu», «C’est vraiment de la balle», «C’est tellement mieux que tout ce qui passe à la télé», «T’imagines si ça leur plaît», «Moi, j’y crois à fond», etc…
Enfin, le fameux mal de ventre, telle une gastro, qui vous saisit au moment d’appeler pour avoir la réponse, qu’on sait déjà au fond de soi négative ; même angoisse en décachetant la missive tant attendue que l’on devine, au regard de la minceur de l’enveloppe, assassine… Où l’on réalise brutalement que tout ceci n’était qu’une chimère, à laquelle il fallait pourtant bien croire pour déjà être capable d’aller au bout de l’écriture du projet.
« Une chance sur 300 », on vous avait dit !
Cela me fait penser au personnage de VATEL dans le film du même nom (Roland JOFFÉ / 2000), qui écrit, juste avant qu’il ne se suicide : « Je croyais que j’étais un artiste et je viens de réaliser que je n’étais qu’un esclave ! »
Heureusement, cette époque est presque révolue. Internet œuvre à briser ces positions dominantes, souvent arbitraires et destructrices, ces interfaces broyeuses de talents qui existent entre les artistes, les auteurs et le public.
Le pouvoir des créateurs, quelle que soit leur discipline - je pense par exemple à ces peintres qui, grâce au web, exposent et vendent leurs toiles dans le monde entier - sera désormais de plus en plus entre leurs mains : quelle merveilleuse nouvelle ! (Oui, je sais bien que c'est pas très nouveau : je fais ce que je peux pour tenter de terminer ce post !!!) :(
Alors finalement, au lieu de hurler, si je poussais plutôt un cri de joie ?!
Oui, et bien c'est bien normal qu'ils usent de ce pouvoir. Et en plus, ça les fait bander sévère de savoir tous ces crèves la fiam qui attendent après le bon vouloir !
Bon allez, faut être plus positif mon gaillard.
Rédigé par : merlinbreizh | 08 avril 2008 à 16:20